Maltraitance médicamenteuse

(JIM)
Pr Jean-Jacques Baudon
Lamaltraitance est une cause notable de morbidité et mortalité chezl'enfant. Quatre formes en sont décrites : maltraitance physique,sexuelle, affective et carence de soins. L'incidence réelle de lamaltraitance est sous-estimée. L'utilisation de médicaments à des finsnon thérapeutiques n'entre pas clairement dans la classification et dece fait est encore davantage méconnue.
Unrelevé de ce type de maltraitance a été effectué aux USA à partir desdonnées des centres antipoison des années 2000 à 2008, incluant lesenfants de moins de 7 ans qui avaient reçu au moins un médicament ou del'alcool à l'exception des substances non médicamenteuses (caustiques,raticides et autres). L'alcool a été retenu car son accès est facile etil est souvent utilisé en conjonction avec d'autres maltraitances enparticulier sexuelles. Les effets des médicaments ont été classés,selon la gravité, nuls, minimes, moyens (avec signes cliniques sansrisque vital ni séquelle), majeurs et d'autre part perdus de vue aprèsle signalement ou sans relation (médicament non responsable destroubles).
Sur environ 21,4 millionsd'expositions aux médicaments signalés, 1 439 cas ont été inclusreprésentant 1 634 intoxications, en tenant compte des intoxicationsmultiples. Le nombre moyen de cas signalés par an a été de 160 (de 124à 189) avec une augmentation linéaire dans le temps (p=0,006). Lesgarçons étaient concernés dans 56,6 % des cas. L'âge médian était de 2ans. L'évolution, connue pour 1 244 enfants (86,4 %), a été considéréede gravité moyenne ou majeure chez 13,8 % des patients avec 18 décès(1,2 %).
Les médicaments les plus fréquemmenten cause entraient dans 11 catégories. Parmi celles-ci, lesanalgésiques arrivaient en premier (176 cas) puis les drogues(marijuana, cocaïne : 173), les sédatifs, hypnotiques, antipsychotiques(benzodiazépines et autres : 158), l'alcool (111), divers topiques(106), des laxatifs (67) et bien d'autres produits, l'origine n'étantparfois pas identifiée (155). Dans 9,7 % des cas, il s'agissait de lacombinaison de plusieurs médicaments et dans 51 % des cas, au moins unsédatif était en cause. Les 18 décès, survenus à l'âge moyen de 1,6 ansétaient liés dans 8 cas à un antihistaminique et dans 8 à un opioïde.Trois facteurs étaient significativement liés aux formes les plussévères : l'utilisation de plusieurs substances, l'emploi d'un sédatifet l'âge inférieur à 2 ans.
En conclusion, l'administration de médicaments devrait être considérée comme une forme importante de maltraitance.


Yin S: Malicious use of pharmaceuticals in children. J Pediatr 2010;157: 832-6