L'Indice de Masse Corporelle (IMC) est-il réellement représentatif de notre corpulence ? A la suite d'un récent débat sur les bénéfices du surpoids, un mathématicien d'Oxford est revenu à l'origine du célèbre indicateur...
Un récent article scientifique, publié dans JAMA, présentant les bienfaits relatifs d'un léger surpoids a fait couler beaucoup d'encre (notamment numérique !) en ce début d'année 2013. Pour mener leur étude, les chercheurs ont agrégé près d'une centaine d'études ayant en commun une définition standard du surpoids et des différentes classes d'obésité. Cette définition se base sur le célèbre Indice de Masse Corporelle (IMC), dont le calcul s'opère simplement, en divisant le poids de l'individu par le carré de la taille. Mais le résultat de l'opération reflète-t-il réellement la corpulence ?
IMC : une mesure inadaptée
Quelques jours après s'être fait écho de la fameuse étude scientifique, la revue The Economist s'est vue poser la question par un mathématicien d'Oxford : "L'IMC est une mesure bizarre", pouvait-on lire dans le courrier des lecteurs. "Nous vivons dans un monde en trois dimensions, mais l'IMC correspond au poids divisé par la taille au carré. Il a été inventé dans les années 1840, avant les calculatrices, lorsqu'une formule se devait d'être simple. En conséquence d'une définition mal établie, des millions de personnes de petite taille pensent qu'ils sont plus minces qu'elles ne le sont, et des millions de personnes de grande taille pensent qu'ils sont plus gros."
Ces quelques lignes ont valu à leur auteur, Nick Trefethen, une avalanche de courriels l'invitant à formuler ses propres préconisations.
En échangeant avec ses collègues et en se documentant sur l'histoire de la mesure, le mathématicien est parvenu "à une réponse de mathématicien", qu'il détaille en ligne dans l'espace mis à sa disposition par l'Université.
Le premier point de son argumentaire est celui exposé dans son courrier à The Economist : une "surface", calculée en multipliant la taille par elle-même, ne peut donner une idée du "volume" occupé par le corps humain. "Cependant, je ne crois pas qu'il suffise simplement de remplacer un carré par un cube," précise-t-il. "Les individus ne grandissent pas de façon parfaitement linéaire." Au lieu d'un exposant 2 (c'est à dire d'une multiplication de la taille par elle même) ou d'un exposant 3 (la taille multipliée par la taille, multiplié par la taille), l'auteur et ses collègues proposent en substance de "couper la poire en deux"… et d'explorer la pertinence d'un exposant 2,5. Une opération somme toute assez simple, puisqu'un "demi exposant" est une banale racine carrée !
Trefethen reconnaît que son idée n'est pas neuve. Il observe qu'Adolphe Quételet, l'inventeur du fameux IMC, avait lui-même suggéré cette valeur (2,5) il y a un siècle et demi. La nécessité d'un calcul "à la portée de tous" avait alors cédé le pas devant les considérations scientifiques.
Un nouvel IMC...
Le mathématicien d'Oxford note que si l'IMC doit évoluer, ses valeurs de références sont entrées dans notre culture. Pour que le "nouvel IMC" conserve l'actuelle valeur associée à la "corpulence normale", l'opération est presque enfantine. Puisque le nouveau calcul n'est jamais que l'ancien IMC divisé par "la racine carré de la taille de l'individu", il suffit de le multiplier par "la racine carré de la taille moyenne de l'être humain". De fait, si l'on mesure effectivement "la taille moyenne", le calcul restera inchangé : on multipliera et on divisera l'IMC classique par le même chiffre !
La taille moyenne retenue par Trefethen correspond au 1,69 mètres - chiffre qui a l'intérêt d'avoir une racine carrée simple : 1,3 ! Cependant, le chercheur reconnaît lui-même qu'un calcul sérieux doit s'ajuster selon le sexe des individus, la taille moyenne des femmes étant inférieure à celui des hommes.
Votre "nouvel IMC" (hors ajustement en fonction de votre sexe) est donc, en définitive, rapide à calculer. Il correspond à la valeur de l'ancien IMC, multipliée par 1,3 et divisée par la racine de votre taille. L'informatique et Internet ayant fait leur apparition depuis Quételet, il n'est pas même besoin de sortir votre calculatrice : l'un des collègues de Trefethen a déjà mis en ligne un calculateur de "nouvel IMC".
"[Les chiffres que je propose] sont ils "justes" ?" s'interroge Trefethen. "Les êtres humains sont complexes et quelque soit la formule utilisée pour calculer l'IMC, elle ne vous donnera qu'un nombre. C'est pourquoi vous n'obtiendrez jamais quelque chose "d'exactement juste". Mais je soupçonne cette nouvelle formule de mieux refléter la manière dont les poids et tailles des adultes [jouent sur leur corpulence]."
En prenant en compte les ajustements du mathématicien, des millions de personnes maigres ou en surpoids redeviennent "de corpulence normale". Trefethen le reconnaît : il n'est ni médecin, ni épidémiologiste. Il suppose cependant que ce mode de calcul permettra à ces deux corps de métier de réaliser leurs recherches de façon plus fine et plus pertinente. "Ma nouvelle formule n'est peut-être pas une bonne idée, pour de nombreuses raisons" s'amuse Trefethen, qui attend avec une impatience non dissimulée l'analyse que pourraient en faire les experts de toute disciplines.
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Un récent article scientifique, publié dans JAMA, présentant les bienfaits relatifs d'un léger surpoids a fait couler beaucoup d'encre (notamment numérique !) en ce début d'année 2013. Pour mener leur étude, les chercheurs ont agrégé près d'une centaine d'études ayant en commun une définition standard du surpoids et des différentes classes d'obésité. Cette définition se base sur le célèbre Indice de Masse Corporelle (IMC), dont le calcul s'opère simplement, en divisant le poids de l'individu par le carré de la taille. Mais le résultat de l'opération reflète-t-il réellement la corpulence ?
IMC : une mesure inadaptée
Quelques jours après s'être fait écho de la fameuse étude scientifique, la revue The Economist s'est vue poser la question par un mathématicien d'Oxford : "L'IMC est une mesure bizarre", pouvait-on lire dans le courrier des lecteurs. "Nous vivons dans un monde en trois dimensions, mais l'IMC correspond au poids divisé par la taille au carré. Il a été inventé dans les années 1840, avant les calculatrices, lorsqu'une formule se devait d'être simple. En conséquence d'une définition mal établie, des millions de personnes de petite taille pensent qu'ils sont plus minces qu'elles ne le sont, et des millions de personnes de grande taille pensent qu'ils sont plus gros."
Ces quelques lignes ont valu à leur auteur, Nick Trefethen, une avalanche de courriels l'invitant à formuler ses propres préconisations.
En échangeant avec ses collègues et en se documentant sur l'histoire de la mesure, le mathématicien est parvenu "à une réponse de mathématicien", qu'il détaille en ligne dans l'espace mis à sa disposition par l'Université.
Le premier point de son argumentaire est celui exposé dans son courrier à The Economist : une "surface", calculée en multipliant la taille par elle-même, ne peut donner une idée du "volume" occupé par le corps humain. "Cependant, je ne crois pas qu'il suffise simplement de remplacer un carré par un cube," précise-t-il. "Les individus ne grandissent pas de façon parfaitement linéaire." Au lieu d'un exposant 2 (c'est à dire d'une multiplication de la taille par elle même) ou d'un exposant 3 (la taille multipliée par la taille, multiplié par la taille), l'auteur et ses collègues proposent en substance de "couper la poire en deux"… et d'explorer la pertinence d'un exposant 2,5. Une opération somme toute assez simple, puisqu'un "demi exposant" est une banale racine carrée !
Trefethen reconnaît que son idée n'est pas neuve. Il observe qu'Adolphe Quételet, l'inventeur du fameux IMC, avait lui-même suggéré cette valeur (2,5) il y a un siècle et demi. La nécessité d'un calcul "à la portée de tous" avait alors cédé le pas devant les considérations scientifiques.
Un nouvel IMC...
Le mathématicien d'Oxford note que si l'IMC doit évoluer, ses valeurs de références sont entrées dans notre culture. Pour que le "nouvel IMC" conserve l'actuelle valeur associée à la "corpulence normale", l'opération est presque enfantine. Puisque le nouveau calcul n'est jamais que l'ancien IMC divisé par "la racine carré de la taille de l'individu", il suffit de le multiplier par "la racine carré de la taille moyenne de l'être humain". De fait, si l'on mesure effectivement "la taille moyenne", le calcul restera inchangé : on multipliera et on divisera l'IMC classique par le même chiffre !
La taille moyenne retenue par Trefethen correspond au 1,69 mètres - chiffre qui a l'intérêt d'avoir une racine carrée simple : 1,3 ! Cependant, le chercheur reconnaît lui-même qu'un calcul sérieux doit s'ajuster selon le sexe des individus, la taille moyenne des femmes étant inférieure à celui des hommes.
Votre "nouvel IMC" (hors ajustement en fonction de votre sexe) est donc, en définitive, rapide à calculer. Il correspond à la valeur de l'ancien IMC, multipliée par 1,3 et divisée par la racine de votre taille. L'informatique et Internet ayant fait leur apparition depuis Quételet, il n'est pas même besoin de sortir votre calculatrice : l'un des collègues de Trefethen a déjà mis en ligne un calculateur de "nouvel IMC".
"[Les chiffres que je propose] sont ils "justes" ?" s'interroge Trefethen. "Les êtres humains sont complexes et quelque soit la formule utilisée pour calculer l'IMC, elle ne vous donnera qu'un nombre. C'est pourquoi vous n'obtiendrez jamais quelque chose "d'exactement juste". Mais je soupçonne cette nouvelle formule de mieux refléter la manière dont les poids et tailles des adultes [jouent sur leur corpulence]."
En prenant en compte les ajustements du mathématicien, des millions de personnes maigres ou en surpoids redeviennent "de corpulence normale". Trefethen le reconnaît : il n'est ni médecin, ni épidémiologiste. Il suppose cependant que ce mode de calcul permettra à ces deux corps de métier de réaliser leurs recherches de façon plus fine et plus pertinente. "Ma nouvelle formule n'est peut-être pas une bonne idée, pour de nombreuses raisons" s'amuse Trefethen, qui attend avec une impatience non dissimulée l'analyse que pourraient en faire les experts de toute disciplines.
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