Un prurit
chronique
Cas clinique
Une patiente
de 35 ans consulte pour un prurit vulvaire associé à des brûlures mictionnelles
et des leucorrhées inodores. L'examen clinique met en évidence un érythème
vulvo-vaginale et des leucorrhées blanchâtres inodores de moyenne abondance.
Quelle
étiologie est évoquée en premier lieu et quel traitement est instauré ?
Une
candidose vulvo-vaginale est diagnostiquée avec la prescription d'un traitement
antifongique local, en crème ou en lait, à appliquer deux fois par jour pendant
au moins 8 jours ; d'une ovule antimycotique (traitement minute le plus facile)
; d'un savon doux calmant et une ordonnance pour le partenaire avec
recommandation de traiter seulement si des symptômes apparaissent.
La patiente
consulte de nouveau six mois plus tard pour des épisodes récidivants de prurit
parfois associé à des leucorrhées blanches. Les différents traitements
antifongiques ont apporté un soulagement de courte durée. À l'examen lors de la
consultation, la vulve est toujours érythémateuse et quelques leucorrhées sont
observées. Un prélèvement vaginal est réalisé et met en évidence de nombreuses
colonies de Candida albicans. Le bacille de Döderlein est absent de la
flore, il n'y a pas de Trichomonas ni de Gardnerella vaginalis.
Quel traitement instaurer ?
Un
traitement antimycotique est prescrit comme précédemment avec des ovules en vue
de rééquilibrer la flore vaginale et de permettre le développement de la flore
commensale de Döderlein.
C'est six
mois plus tard que cette même patiente consulte et décrit à nouveau la
persistance d'un prurit sans leucorrhées associées. Il existe également des
dyspareunies. Les différents prélèvements vaginaux étaient négatifs. À
l'examen, la vulve est érythémateuse, il n'y a pas de leucorrhées, mais un
accolement de la partie inférieure des petites lèvres, qui semblent
disparaître, est constaté. Quel diagnostic peut être évoqué et quel traitement
peut être proposé ?
Un lichen
scléreux est évoqué et le diagnostic sera confirmé par une biopsie. Le traitement
est à base de corticoïdes locaux.
La patiente doit être informée du caractère chronique de la maladie et de ses
symptômes.
Discussion
Le lichen
scléreux est une pathologie cutanéo-muqueuse à prédominance vulvaire, non
cancéreuse. Son diagnostic et son suivi sont importants en raison de la
chronicité des symptômes et du risque de transformation en carcinome
épidermoïde invasif.
Le diagnostic repose principalement sur l'examen clinique.
Son
incidence n'est pas connue, une étude a cependant montré que le lichen scléreux
affectait 1,7 % des patientes dans une consultation de gynécologie générale.
Dans une autre étude, il affecterait 15 % des patientes d'une consultation
spécialisée de pathologie vulvaire.
Des patientes de tout âge peuvent être atteintes, mais il représente un motif
de consultation plus fréquent lors de la périménopause. Les hommes peuvent être
également atteints.
Les
principaux signes cliniques sont :
- le prurit ;
- les brûlures vulvaires ;
- la dyspareunie d'intromission ;
- la sécheresse vulvaire.
Le prurit,
principal symptôme, justifie le plus souvent la consultation. Il est présent
dans 70 % des cas. Il est d'intensité variable, continue ou apparaissant par
intermittence et souvent une recrudescence nocturne.
Les brûlures
vulvaires s'associent ou remplacent le prurit et peuvent résulter de lésions
dues au grattage.
La dyspareunie est liée à des lésions de la fourchette vulvaire (érosions,
fissures). Dans des cas très évolués, il peut exister des remaniements avec
sténoses orificielles.
La sécheresse vaginale est due à l'atrophie des glandes annexielles, qui
permettent la lubrification.
Exceptionnellement, on peut constater des hémorragies vulvaires ou anales, un
vaginisme, une constipation, voire une dysurie.
L'aspect
clinique dans sa forme classique distingue une vulve blanche nacrée présentant
des remaniements anatomiques. Les modifications de couleurs sont en nappes plus
ou moins étendues, principalement au niveau de la face interne des grandes
lèvres, des petites lèvres, de la fourchette et du clitoris. Les remaniements
se caractérisent par une atrophie des petites lèvres qui peuvent « fusionner »
avec les grandes lèvres (synéchies) au niveau de leur partie postérieure,
responsable d'un rétrécissement de la partie postérieure de la vulve. Il peut
également exister des synéchies au niveau du clitoris qui devient encapuchonné.
Dans les formes évoluées, il peut y avoir une perte des reliefs de la vulve.
Le
traitement repose principalement sur la corticothérapie locale. Le plus
souvent, c'est un traitement d'attaque, par dermocorticoïdes de classe I
pendant 3 mois, relayé par des dermocorticoïdes de classe II jusqu'à
disparition du prurit.
La toilette intime doit être « normale » et peu agressive avec un savon doux ou
surgras.
La chirurgie
peut parfois être indiquée en cas de lésions suspectes ou lorsqu'une plastie
est nécessaire.
Conclusion
Le lichen
scléreux est une pathologie chronique responsable d'un prurit qui peut être
invalidant tant sur le plan physique que psychique et retentir sur la vie
sexuelle des patientes. Il faut y penser devant un prurit chronique, récidivant
et résistant à tout traitement de vulvo-vaginite infectieuse. Le traitement
repose sur la corticothérapie locale. Certaines patientes peuvent également être
soulagées par l'adjonction de traitements homéopathiques. Dans tous les cas, la
patiente et son conjoint doivent être informés du caractère chronique de cette
maladie.
Références bibliographiques[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
- O'Connell T, Nathan L, Satmary W, Goldstein A.
Non-neoplastic epithelial disorders of the vulva. Am Fam Physician
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l'égide du Collège national des gynécologues et obstétriciens français.
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Dr Gaëlle POULIZAC, Reims
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