Fractures sous trochantériennes ou diaphysaires du fémur : les bisphosphonates innocentés
le 10 MAI 2010
Plusieurs petites séries de cas cliniques ont laissé penser récemment que la prise de bisphosphonates au long cours pouvait favoriser la survenue de fractures sous trochantériennes ou diaphysaires du fémur. Ce soupçon a paru renforcé lorsqu’un travail basé sur un registre danois a retrouvé une élévation de la fréquence de ces fractures chez les sujets prenant de l’alendronate.
Toutefois, ces diverses publications non prospectives et non randomisées, ne permettent pas d’éliminer des biais et notamment un biais d’indication (le risque de ce type de fractures pourrait être lié non aux bisphosphonates eux-mêmes mais à leur indication).
Pour éclaircir cette question d’importance (étant donné le nombre de patientes traitées par bisphosphonates dans le monde), un groupe multicentrique a repris les données de 3 grands essais contrôlés, randomisés en double aveugle des bisphosphonates dans la prévention des fractures ostéoporotiques, les études FIT et FLEX (avec l’alendronate) et HORIZON avec l’acide zolédronique. Au total ces essais ont concerné plus de 14 000 patientes et plus de 51 000 années-patientes de suivi (la durée de surveillance allant jusqu’à 10 ans dans FLEX).
12 fractures pour 51 000 années-patientes
Sur ce très grand nombre de sujets, seules 12 fractures (chez 10 patientes) atteignaient les régions sous trochantériennes ou diaphysaires du fémur (soit un taux de 2,3 pour 10 000 patientes-années). Le risque relatif de ce type de fracture est apparu non significatif dans les 3 études (1,03 dans FIT, 1,33 dans FLEX et 1,50 dans HORIZON) avec compte tenu de la rareté des événements des intervalles de confiance à 95 % très larges dans les 3 cas (0,06 à 16,46 pour FIT, 0,12 à 14,67 pour FLEX et 0,25 à 9 pour HORIZON).
Les fractures sous trochantériennes ou diaphysaires du fémur sont donc extrêmement rares chez les femmes ménopausées ostéoporotiques traitées ou non par bisphosphonates. Rien dans ce travail ne permet de confirmer que leur risque soit augmenté par la prise de bisphosphonates au long cours. Mais, même si, par hypothèse, on considérait que le risque relatif de fractures de ce type était augmenté réellement de 50 % par les bisphosphonates, il faudrait traiter 1 000 femmes durant 3 ans pour entraîner 0,3 fractures alors que ce traitement permet d’épargner 100 fractures ostéoporotiques classiques sur la même durée et le même nombre de femmes.
Un nouvel essai randomisé sur ce thème spécifique étant inenvisageable, il faudra se contenter en pratique de ce travail rassurant car les conclusions de nouvelles études observationnelles, même très rigoureuses, ne permettront vraisemblablement pas d’aller plus loin en raison de la rareté du phénomène.
Dr Céline Dupin
Black D et coll. : Bisphosphonates and fractures of the subtrochanteric or diaphysal femur. N Engl J Med 2010,
le 10 MAI 2010
Plusieurs petites séries de cas cliniques ont laissé penser récemment que la prise de bisphosphonates au long cours pouvait favoriser la survenue de fractures sous trochantériennes ou diaphysaires du fémur. Ce soupçon a paru renforcé lorsqu’un travail basé sur un registre danois a retrouvé une élévation de la fréquence de ces fractures chez les sujets prenant de l’alendronate.
Toutefois, ces diverses publications non prospectives et non randomisées, ne permettent pas d’éliminer des biais et notamment un biais d’indication (le risque de ce type de fractures pourrait être lié non aux bisphosphonates eux-mêmes mais à leur indication).
Pour éclaircir cette question d’importance (étant donné le nombre de patientes traitées par bisphosphonates dans le monde), un groupe multicentrique a repris les données de 3 grands essais contrôlés, randomisés en double aveugle des bisphosphonates dans la prévention des fractures ostéoporotiques, les études FIT et FLEX (avec l’alendronate) et HORIZON avec l’acide zolédronique. Au total ces essais ont concerné plus de 14 000 patientes et plus de 51 000 années-patientes de suivi (la durée de surveillance allant jusqu’à 10 ans dans FLEX).
12 fractures pour 51 000 années-patientes
Sur ce très grand nombre de sujets, seules 12 fractures (chez 10 patientes) atteignaient les régions sous trochantériennes ou diaphysaires du fémur (soit un taux de 2,3 pour 10 000 patientes-années). Le risque relatif de ce type de fracture est apparu non significatif dans les 3 études (1,03 dans FIT, 1,33 dans FLEX et 1,50 dans HORIZON) avec compte tenu de la rareté des événements des intervalles de confiance à 95 % très larges dans les 3 cas (0,06 à 16,46 pour FIT, 0,12 à 14,67 pour FLEX et 0,25 à 9 pour HORIZON).
Les fractures sous trochantériennes ou diaphysaires du fémur sont donc extrêmement rares chez les femmes ménopausées ostéoporotiques traitées ou non par bisphosphonates. Rien dans ce travail ne permet de confirmer que leur risque soit augmenté par la prise de bisphosphonates au long cours. Mais, même si, par hypothèse, on considérait que le risque relatif de fractures de ce type était augmenté réellement de 50 % par les bisphosphonates, il faudrait traiter 1 000 femmes durant 3 ans pour entraîner 0,3 fractures alors que ce traitement permet d’épargner 100 fractures ostéoporotiques classiques sur la même durée et le même nombre de femmes.
Un nouvel essai randomisé sur ce thème spécifique étant inenvisageable, il faudra se contenter en pratique de ce travail rassurant car les conclusions de nouvelles études observationnelles, même très rigoureuses, ne permettront vraisemblablement pas d’aller plus loin en raison de la rareté du phénomène.
Dr Céline Dupin
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