S. Vergnaud
Un syndrome délirant est caractérisé par la présence d’une ou plusieurs idées délirantes. Il est parfois
difficile de reconnaître le caractère délirant d’un propos, en particulier lorsque la cohérence formelle du
discours et la conviction du sujet sont telles qu’elles peuvent entraîner l’adhésion de l’entourage. Le rôle
du médecin est donc dans un premier temps de reconnaître le caractère délirant d’une ou de plusieurs
idées.
© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
■ Introduction
Un syndrome délirant est constitué par un ensemble de
symptômes pouvant être rencontrés dans différentes pathologies
psychiatriques ou non. Les situations dans lesquelles le praticien
peut y être confronté sont également diverses (service d’urgences,
cabinet, contexte chronique ou trouble aigu du
comportement).
La terminologie « syndrome délirant » inclut non seulement
les idées délirantes décelables dans le discours du patient et
révélatrices de troubles de la pensée, mais aussi des troubles des
conduites dans le cas où la conviction délirante amène le
patient à « agir » son délire et des troubles des perceptions telles
que les illusions et les hallucinations qui attestent d’une
perturbation des deux modalités de prise de conscience d’un
objet : la perception sensorielle et la représentation mentale.
Il convient avant tout d’entrer en contact avec ces patients
afin d’être à même de réaliser un bilan étiologique approprié,
permettant d’intégrer les idées délirantes dans le cadre d’une
pathologie psychiatrique ou médicale
Une fois ce premier bilan réalisé et une affection médicale
écartée, une consultation psychiatrique s’impose afin de
rechercher et préciser les signes pouvant orienter le diagnostic
psychiatrique !
■ Caractérisation d’une idée
délirante
Il est plus facile de repérer un délire que de donner une
définition du délire qui correspond à une altération du système
de réalité. L’idéation délirante est une idéation morbide
comportant tout à la fois une conviction inébranlable, un
sentiment d’évidence interne et une contradiction avec la
réalité.
Elle est personnelle au sujet et non partagée par le groupe
socioculturel auquel il appartient. Les éléments de la culture du
sujet doivent être pris en compte dans l’interprétation du
caractère invraisemblable d’une idée.
Le manque d’éléments de réalité pour affirmer la fausseté des
idées ou encore un certain degré de doute dans le discours du
sujet peut rendre parfois très difficile la distinction entre réalité
et délire. Rappelons, comme l’a souligné Ey, que « ce n’est pas
l’erreur qui fonde le délire, mais les modalités de la connaissance
délirante toujours enracinée à un certain moment au
moins, dans l’irrationnel ».
Caractères généraux
Les idées délirantes peuvent être :
• vagues et floues, ou au contraire précises et clairement
énoncées ;
• fixes et monotones, ou bien mobiles ;
• mono- ou plurithématiques ;
• absurdes, bizarres, invraisemblables ou encore cohérentes,
plausibles jusqu’à un certain point.
Ces éléments permettent d’apprécier le degré d’organisation
du délire, c’est-à-dire l’existence ou non d’une structure logique
et organisée sous-jacente.
On note aussi le degré d’extension du délire, c’est-à-dire son
niveau d’envahissement dans les différents secteurs de la vie du
sujet. Il peut être limité (délire en secteur ; exemple : délire de jalousie centré sur une personne) ou très étendu (délire en
réseau ; exemple : bouffée délirante aiguë avec sentiment diffus
de persécution).
Le rapport du patient à ses idées délirantes est à noter : la
conviction peut être absolue, inentamable par les réfutations ou
les preuves de réalité, mais elle peut aussi coexister avec une
certaine conscience de sa nature morbide, voire un certain degré
de critique, variables dans le temps. Il arrive même qu’un
patient déjà suivi en psychiatrie vienne spontanément consulter
en déclarant qu’il « recommence à délirer ». Un délire ancien est
aussi susceptible de s’atténuer (enkystement) et de laisser place
à des modalités de fonctionnement plus adaptées. Cette persistance
à bas bruit est toujours susceptible de réactivation.
Mécanisme du délire
Différents mécanismes sont à l’oeuvre dans l’élaboration
délirante ; ils sont le plus souvent associés, mais l’un d’entre eux
prédomine souvent.
Interprétation
C’est un raisonnement faux qui a pour point de départ une
sensation réelle ou un fait exact auquel est donné une signification
erronée.
Par exemple, un malade se sentant fatigué pense qu’on lui a
inoculé un virus (interprétation endogène), ou bien un malade,
après avoir été bousculé dans le métro, pense qu’il s’agit d’un
avertissement (interprétation exogène).
Intuition
Mécanisme rarement isolé, la connaissance intuitive s’impose
au sujet comme une évidence soudaine et immédiate, sans
justification logique. Exemple : « J’ai compris tout à coup que
j’étais le fils de Dieu ».
Imagination ou fabulation
C’est un enrichissement du délire par des éléments issus de
l’imagination du sujet, volontiers extravagants ou fantaisistes.
Par exemple, filiation illustre, intervention de personnages
mystérieux.
Illusions
Il s’agit de déformations de la perception d’un objet réel
pouvant affecter tous les sens. Exemple : un patient croit
entendre son enfant pleurer en entendant des cris à la télévision.
On peut aussi observer des variations quantitatives des
perceptions (fadeur, atonie ou au contraire hyperesthésie).
Hallucinations
Ce sont de fausses perceptions qui surviennent en l’absence
de stimulus extérieur : « perception sans objet à percevoir »
(H. Ey).
On distingue les hallucinations psychosensorielles et les
hallucinations intrapsychiques.
Points essentiels
Attitudes évocatrices d’un patient halluciné
• Attitudes d’écoute (attention tournée vers les voix
plutôt que vers l’interlocuteur).
• Dialogue hallucinatoire.
• Conduites de défense vis-à-vis des voix (utilisation de
bouchons d’oreilles ou de walkman).
Hallucinations psychosensorielles
Ce sont des hallucinations vraies qui peuvent intéresser tous
les domaines perceptifs. Elles peuvent être simples, élémentaires
(sons, éclairs, attouchements), ou bien complexes et élaborées
(conversations, scènes ou images). Les plus fréquentes sont les
hallucinations auditives et visuelles, les autres (tactiles ou
cénesthésiques, olfactives et gustatives) sont plus rares.
Hallucinations psychiques
Ce sont de « fausses hallucinations » puisqu’elles perdent
leurs indices de sensorialité et de spatialité. Elle sont difficiles à
mettre en évidence et se décrivent comme des « voix intérieures
», caractéristiques par leur absence de subjectivité. En effet,
le sujet ne fait pas sien le contenu de ce qu’il pense ou éprouve,
qui est attribué à l’extérieur et qui représente pour lui une
intrusion dans le secret de sa conscience. Le sujet entend des
mots, des phrases ou des conversations interférant avec sa
propre pensée et qu’il explique souvent par des phénomènes de
« transmission de pensée » ou de « télépathie ».
Un syndrome délirant est caractérisé par la présence d’une ou plusieurs idées délirantes. Il est parfois
difficile de reconnaître le caractère délirant d’un propos, en particulier lorsque la cohérence formelle du
discours et la conviction du sujet sont telles qu’elles peuvent entraîner l’adhésion de l’entourage. Le rôle
du médecin est donc dans un premier temps de reconnaître le caractère délirant d’une ou de plusieurs
idées.
© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
■ Introduction
Un syndrome délirant est constitué par un ensemble de
symptômes pouvant être rencontrés dans différentes pathologies
psychiatriques ou non. Les situations dans lesquelles le praticien
peut y être confronté sont également diverses (service d’urgences,
cabinet, contexte chronique ou trouble aigu du
comportement).
La terminologie « syndrome délirant » inclut non seulement
les idées délirantes décelables dans le discours du patient et
révélatrices de troubles de la pensée, mais aussi des troubles des
conduites dans le cas où la conviction délirante amène le
patient à « agir » son délire et des troubles des perceptions telles
que les illusions et les hallucinations qui attestent d’une
perturbation des deux modalités de prise de conscience d’un
objet : la perception sensorielle et la représentation mentale.
Il convient avant tout d’entrer en contact avec ces patients
afin d’être à même de réaliser un bilan étiologique approprié,
permettant d’intégrer les idées délirantes dans le cadre d’une
pathologie psychiatrique ou médicale
Une fois ce premier bilan réalisé et une affection médicale
écartée, une consultation psychiatrique s’impose afin de
rechercher et préciser les signes pouvant orienter le diagnostic
psychiatrique !
■ Caractérisation d’une idée
délirante
Il est plus facile de repérer un délire que de donner une
définition du délire qui correspond à une altération du système
de réalité. L’idéation délirante est une idéation morbide
comportant tout à la fois une conviction inébranlable, un
sentiment d’évidence interne et une contradiction avec la
réalité.
Elle est personnelle au sujet et non partagée par le groupe
socioculturel auquel il appartient. Les éléments de la culture du
sujet doivent être pris en compte dans l’interprétation du
caractère invraisemblable d’une idée.
Le manque d’éléments de réalité pour affirmer la fausseté des
idées ou encore un certain degré de doute dans le discours du
sujet peut rendre parfois très difficile la distinction entre réalité
et délire. Rappelons, comme l’a souligné Ey, que « ce n’est pas
l’erreur qui fonde le délire, mais les modalités de la connaissance
délirante toujours enracinée à un certain moment au
moins, dans l’irrationnel ».
Caractères généraux
Les idées délirantes peuvent être :
• vagues et floues, ou au contraire précises et clairement
énoncées ;
• fixes et monotones, ou bien mobiles ;
• mono- ou plurithématiques ;
• absurdes, bizarres, invraisemblables ou encore cohérentes,
plausibles jusqu’à un certain point.
Ces éléments permettent d’apprécier le degré d’organisation
du délire, c’est-à-dire l’existence ou non d’une structure logique
et organisée sous-jacente.
On note aussi le degré d’extension du délire, c’est-à-dire son
niveau d’envahissement dans les différents secteurs de la vie du
sujet. Il peut être limité (délire en secteur ; exemple : délire de jalousie centré sur une personne) ou très étendu (délire en
réseau ; exemple : bouffée délirante aiguë avec sentiment diffus
de persécution).
Le rapport du patient à ses idées délirantes est à noter : la
conviction peut être absolue, inentamable par les réfutations ou
les preuves de réalité, mais elle peut aussi coexister avec une
certaine conscience de sa nature morbide, voire un certain degré
de critique, variables dans le temps. Il arrive même qu’un
patient déjà suivi en psychiatrie vienne spontanément consulter
en déclarant qu’il « recommence à délirer ». Un délire ancien est
aussi susceptible de s’atténuer (enkystement) et de laisser place
à des modalités de fonctionnement plus adaptées. Cette persistance
à bas bruit est toujours susceptible de réactivation.
Mécanisme du délire
Différents mécanismes sont à l’oeuvre dans l’élaboration
délirante ; ils sont le plus souvent associés, mais l’un d’entre eux
prédomine souvent.
Interprétation
C’est un raisonnement faux qui a pour point de départ une
sensation réelle ou un fait exact auquel est donné une signification
erronée.
Par exemple, un malade se sentant fatigué pense qu’on lui a
inoculé un virus (interprétation endogène), ou bien un malade,
après avoir été bousculé dans le métro, pense qu’il s’agit d’un
avertissement (interprétation exogène).
Intuition
Mécanisme rarement isolé, la connaissance intuitive s’impose
au sujet comme une évidence soudaine et immédiate, sans
justification logique. Exemple : « J’ai compris tout à coup que
j’étais le fils de Dieu ».
Imagination ou fabulation
C’est un enrichissement du délire par des éléments issus de
l’imagination du sujet, volontiers extravagants ou fantaisistes.
Par exemple, filiation illustre, intervention de personnages
mystérieux.
Illusions
Il s’agit de déformations de la perception d’un objet réel
pouvant affecter tous les sens. Exemple : un patient croit
entendre son enfant pleurer en entendant des cris à la télévision.
On peut aussi observer des variations quantitatives des
perceptions (fadeur, atonie ou au contraire hyperesthésie).
Hallucinations
Ce sont de fausses perceptions qui surviennent en l’absence
de stimulus extérieur : « perception sans objet à percevoir »
(H. Ey).
On distingue les hallucinations psychosensorielles et les
hallucinations intrapsychiques.
Points essentiels
Attitudes évocatrices d’un patient halluciné
• Attitudes d’écoute (attention tournée vers les voix
plutôt que vers l’interlocuteur).
• Dialogue hallucinatoire.
• Conduites de défense vis-à-vis des voix (utilisation de
bouchons d’oreilles ou de walkman).
Hallucinations psychosensorielles
Ce sont des hallucinations vraies qui peuvent intéresser tous
les domaines perceptifs. Elles peuvent être simples, élémentaires
(sons, éclairs, attouchements), ou bien complexes et élaborées
(conversations, scènes ou images). Les plus fréquentes sont les
hallucinations auditives et visuelles, les autres (tactiles ou
cénesthésiques, olfactives et gustatives) sont plus rares.
Hallucinations psychiques
Ce sont de « fausses hallucinations » puisqu’elles perdent
leurs indices de sensorialité et de spatialité. Elle sont difficiles à
mettre en évidence et se décrivent comme des « voix intérieures
», caractéristiques par leur absence de subjectivité. En effet,
le sujet ne fait pas sien le contenu de ce qu’il pense ou éprouve,
qui est attribué à l’extérieur et qui représente pour lui une
intrusion dans le secret de sa conscience. Le sujet entend des
mots, des phrases ou des conversations interférant avec sa
propre pensée et qu’il explique souvent par des phénomènes de
« transmission de pensée » ou de « télépathie ».
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