Exposition au formaldéhyde et davantage d'infections respiratoires basses pour les bébés de PARIS

07/09/11
(JIM)
Dr Claudine Goldgewicht

Utilisé, entre autres, comme biocide, conservateur, fixateur, le formaldéhyde, polluant majeur de l'air intérieur, est présent dans les matériaux de construction et de décoration, dans les bois agglomérés et contreplaqués, les textiles, résines, tissus d'ameublement, mousses isolantes, vernis..., et dans la fumée de cigarettes. Il est irritant pour les yeux et les voies aériennes, supérieures et inférieures, a été associé à l'asthme de l'enfant dans certains travaux, mais ses effets sur la santé respiratoire des tout-petits ont jusque-là été peu explorés. Des équipes françaises ont cherché à pallier ce manque en évaluant l'impact de l'exposition au formaldéhyde sur l'incidence des infections respiratoires basses au cours de la première année de vie.
C'est dans le cadre du suivi prospectif d'une cohorte de naissance, celle de l'étude PARIS (Pollution and Asthma Risk : an Infant Study), que s'est inscrite cette évaluation. La cohorte PARIS comptait 4 177 nouveau-nés singletons, en bonne santé, enrôlés dans cinq maternités parisiennes entre 2003 et 2006, nés à terme et pesant plus de 2 500 g, indemnes de complications périnatales, dont les parents habitaient la capitale ou la proche banlieue.
Les niveaux de formaldéhyde ont été mesurés au domicile, dans la chambre à coucher d'un échantillon de 196 bébés, tiré au sort, et estimés pour 2 940 enfants en s'appuyant sur des modèles prédictifs fondés sur les mesures et données intéressant les déterminants potentiels des niveaux de formaldéhyde. Ces modèles ont pris en compte notamment les sources d'émission et leur ancienneté (revêtements muraux, parquets, panneaux de particules du mobilier), les paramètres de renouvellement d'air (durée d'ouverture des fenêtres, installation de ventilation, double-vitrage), la surface d'habitation, le nombre de personnes vivant au foyer, la date de construction du bâtiment d'habitation. Les données de santé ont été obtenues, à la naissance, à l'occasion d'un entretien avec les mères, puis ont été suivies par auto-questionnaires remplis par les parents lorsque l'enfant était âgé de 1, 3, 6, 9, et 12 mois.
Dans la population étudiée, de près de 3 000 enfants, 45,8 % ont eu au moins une infection respiratoire basse pendant la première année de vie, accompagnée de wheezing dans 48,7 % des cas. Au cours de ces 12 premiers mois d'existence, il a été estimé que 43,3 % des enfants ont été exposés à un niveau moyen de formaldéhyde dépassant 19,5 ± 5,4 µg/m3.
L'analyse a pris en compte de nombreux facteurs confondants potentiels et facteurs de risque d'infection des voies respiratoires inférieures (dont l'allaitement maternel au moins trois mois durant, la présence d'animaux domestiques, les antécédents parentaux d'asthme, la présence d'une fratrie plus âgée, le mode de garde, l'exposition à la fumée de tabac). Elle associe significativement, avant et après ajustements, exposition au formaldéhyde et infections respiratoires basses, notamment sifflantes. À chaque quartile d'accroissement des niveaux de formaldéhyde (12,4 µg/m3) était associé une augmentation estimée de 32 % (IC à 95 % 11-55 % ; p = 0,001) de l'incidence des infections respiratoires basses et de 41 % (14-74 % ; p = 0,001) des infections respiratoires basses sifflantes
Cette étude est, selon ses auteurs, la première à apporter des données montrant la relation entre exposition au formaldéhyde, largement répandu dans les habitations, et survenue d'infections respiratoires basses dans une population particulièrement vulnérable, celle de tout-petits, de la naissance à 12 mois. L'accent est mis sur la limitation des matériaux sources d'émissions de formaldéhyde, et l'aération des habitations.



Roda C et coll. : Formaldehyde exposure and lower repiratory infections in infants : Findings from the PARIS Cohort Study. Environ Health Perspect, 2011 ; Publication avancée en ligne le 2 août (doi:10.1289/ehp.1003222).