Responsabilité du médecin dans le cadre des relations entre confrères - Les responsabilités du remplaçant et du remplacé
(K Particulier)
Emmanuelle BUISSON, Juriste en Droit de la Santé
Les faits
Un patient de 49 ans est opéré en 1998 pour une dysmorphie ancienne de l'articulation acromioclaviculaire gauche. Deux jours plus tard (J+2), le drain de Redon est retiré ; le patient sort le jour-même sans avoir vu le chirurgien qui devait venir le voir dans l'après-midi.
Le lendemain (J+3), le patient présente une fièvre de 38,5° C à 39° C avec vomissements. Le médecin traitant appelé par le patient examine ce dernier et lui prescrit une antibiothérapie dont la nature n'est pas précisée.
Le surlendemain (J+4), l'état ne s'améliore pas ; le remplaçant du médecin traitant contacté confirme l'antibiothérapie.
À J+7, le patient souffre de douleurs épigastriques et de douleurs autour de la plaie ; le médecin traitant prescrit une hospitalisation avec un courrier adressé au chirurgien qui avait opéré le patient quelques jours auparavant. Ce n'est que le lendemain (J+ que le médecin traitant arrivait à joindre un autre chirurgien de la clinique. Ce dernier conseillait alors de consulter le chirurgien opérateur le lendemain, qui était ainsi informé, à J+9, de l'appel du patient, mais qui ne le voyait pas en consultation.
À J+12, le patient présente toujours des douleurs scapulaires, une asthénie importante, un subictère et des douleurs abdominales. Le remplaçant du médecin traitant l'adresse alors à la clinique dans laquelle il a été opéré : un staphylococcus aureus est mis en évidence. Le chirurgien opérateur adresse alors le patient au centre hospitalier. Une hépatomégalie sans dilatation des voies biliaires était mise en évidence, suivie d'une antibiothérapie. Le patient décédait 24 heures plus tard après un état de choc suivi d'un transfert en réanimation.
La procédure
L'autopsie réalisée rapportait une endocardite aortique importante associée à un abcès pariétal cardiaque antérieur et un infarctus rénal.
L'expertise diligentée concluait au diagnostic d'infection nosocomiale. Selon lui, il est regrettable que les deux médecins généralistes n'aient pas prescrit un bilan sanguin qui aurait permis de poser le diagnostic plus tôt et donc une hospitalisation plus précoce. Mais, toujours selon l'expert, il n'est pas possible d'affirmer qu'une hospitalisation avancée aurait permis d'éviter le décès du patient.
Le Tribunal de Grande Instance retenait d'une part un "dysfonctionnement dans le suivi des interventions chirurgicales de la part du chirurgien et de la clinique", à l'origine d'un retard de 48 heures ayant joué un rôle dans l'aggravation de l'état du patient. Ce dysfonctionnement s'illustre par les difficultés du médecin traitant à joindre le chirurgien opérateur et la clinique 7 jours après l'intervention.
Les magistrats retenaient d'autre part des fautes imputables au médecin traitant et à son remplaçant, ayant fait perdre au patient une chance de survivre. Selon les juges, le médecin traitant n'a "pas insisté suffisamment auprès de son patient et de la clinique sur l'urgence de la consultation" à J+7. Quant au médecin remplaçant, sa part de responsabilité est réduite en raison de son statut de remplaçant, du fait qu'il ait fait hospitaliser le patient et qu'il soit "intervenu après un premier examen du médecin traitant".
La responsabilité de la clinique (70 %) et du chirurgien orthopédiste opérateur (10 %) était engagée en vertu de leur obligation de résultat tandis que la responsabilité du médecin traitant (10 %) et celle du remplaçant (5 %) étaient engagée en vertu de leur obligation de moyens. Ils étaient ainsi condamnés à verser 222 078 € à la famille du patient décédé, dont 128 910 € pour les organismes sociaux.
Notons enfin qu'une part de responsabilité (5 %) est laissée à la charge du patient qui a quitté la clinique sans attendre l'avis du chirurgien et qui n'a pas suivi les recommandations des médecins généralistes lui préconisant de consulter le chirurgien.
05.14 UVD 09 F 1625 IN
(K Particulier)
Emmanuelle BUISSON, Juriste en Droit de la Santé
Les faits
Un patient de 49 ans est opéré en 1998 pour une dysmorphie ancienne de l'articulation acromioclaviculaire gauche. Deux jours plus tard (J+2), le drain de Redon est retiré ; le patient sort le jour-même sans avoir vu le chirurgien qui devait venir le voir dans l'après-midi.
Le lendemain (J+3), le patient présente une fièvre de 38,5° C à 39° C avec vomissements. Le médecin traitant appelé par le patient examine ce dernier et lui prescrit une antibiothérapie dont la nature n'est pas précisée.
Le surlendemain (J+4), l'état ne s'améliore pas ; le remplaçant du médecin traitant contacté confirme l'antibiothérapie.
À J+7, le patient souffre de douleurs épigastriques et de douleurs autour de la plaie ; le médecin traitant prescrit une hospitalisation avec un courrier adressé au chirurgien qui avait opéré le patient quelques jours auparavant. Ce n'est que le lendemain (J+ que le médecin traitant arrivait à joindre un autre chirurgien de la clinique. Ce dernier conseillait alors de consulter le chirurgien opérateur le lendemain, qui était ainsi informé, à J+9, de l'appel du patient, mais qui ne le voyait pas en consultation.
À J+12, le patient présente toujours des douleurs scapulaires, une asthénie importante, un subictère et des douleurs abdominales. Le remplaçant du médecin traitant l'adresse alors à la clinique dans laquelle il a été opéré : un staphylococcus aureus est mis en évidence. Le chirurgien opérateur adresse alors le patient au centre hospitalier. Une hépatomégalie sans dilatation des voies biliaires était mise en évidence, suivie d'une antibiothérapie. Le patient décédait 24 heures plus tard après un état de choc suivi d'un transfert en réanimation.
La procédure
L'autopsie réalisée rapportait une endocardite aortique importante associée à un abcès pariétal cardiaque antérieur et un infarctus rénal.
L'expertise diligentée concluait au diagnostic d'infection nosocomiale. Selon lui, il est regrettable que les deux médecins généralistes n'aient pas prescrit un bilan sanguin qui aurait permis de poser le diagnostic plus tôt et donc une hospitalisation plus précoce. Mais, toujours selon l'expert, il n'est pas possible d'affirmer qu'une hospitalisation avancée aurait permis d'éviter le décès du patient.
Le Tribunal de Grande Instance retenait d'une part un "dysfonctionnement dans le suivi des interventions chirurgicales de la part du chirurgien et de la clinique", à l'origine d'un retard de 48 heures ayant joué un rôle dans l'aggravation de l'état du patient. Ce dysfonctionnement s'illustre par les difficultés du médecin traitant à joindre le chirurgien opérateur et la clinique 7 jours après l'intervention.
Les magistrats retenaient d'autre part des fautes imputables au médecin traitant et à son remplaçant, ayant fait perdre au patient une chance de survivre. Selon les juges, le médecin traitant n'a "pas insisté suffisamment auprès de son patient et de la clinique sur l'urgence de la consultation" à J+7. Quant au médecin remplaçant, sa part de responsabilité est réduite en raison de son statut de remplaçant, du fait qu'il ait fait hospitaliser le patient et qu'il soit "intervenu après un premier examen du médecin traitant".
La responsabilité de la clinique (70 %) et du chirurgien orthopédiste opérateur (10 %) était engagée en vertu de leur obligation de résultat tandis que la responsabilité du médecin traitant (10 %) et celle du remplaçant (5 %) étaient engagée en vertu de leur obligation de moyens. Ils étaient ainsi condamnés à verser 222 078 € à la famille du patient décédé, dont 128 910 € pour les organismes sociaux.
Notons enfin qu'une part de responsabilité (5 %) est laissée à la charge du patient qui a quitté la clinique sans attendre l'avis du chirurgien et qui n'a pas suivi les recommandations des médecins généralistes lui préconisant de consulter le chirurgien.
05.14 UVD 09 F 1625 IN
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