L'exposition environnementale au benzène pendant la grossesse pourrait aussi majorer le risque de spina bifida

(JIM)

Dr Claudine Goldgewicht

Différents travaux suggèrent un lien entre l'exposition professionnelle maternelle aux solvants organiques (dont le benzène) et le risque de malformations congénitales de l'enfant, notamment du tube neural. Cette fois, des auteurs américains ont entrepris d'évaluer la relation entre niveaux d'exposition maternelle environnementale aux BTEX (benzène, toluène, éthylbenzène, xylènes) et spina bifida et anencéphalie de l'enfant.
Une étude cas-témoins a été conduite, qui s'est appuyée sur les données du Texas Birth Defects Registryintéressant les cas de spina bifida et d'anencéphalie rapportés chez les enfants nés entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2004. Elle a porté sur 533 cas de spina bifida et 303 cas d'anencéphalie, auxquels ont été appariés, pour l'année de naissance, 3 695 témoins tirés au sort parmi les enfants nés vivants, en bonne santé, à la même période que les cas.
Les niveaux annuels de BTEX ambiants ont été estimés à partir d'un modèle établi par l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis (l' Assessment System for Population Exposure Nationwide- ASPEN), prenant en considération nombre de paramètres dont les taux d'émissions de polluants, leurs site d'émissions, leur devenir, leur transformation, ainsi que les conditions météorologiques. Les niveaux de BTEX à l'adresse résidentielle maternelle lors de l'accouchement ont également été évalués.
De nombreux facteurs confondants ont été pris en compte, notamment le sexe de l'enfant, l'année de naissance, l'ethnie de la mère, son lieu de naissance, son âge, son niveau d'éducation, son statut marital, son tabagisme, la parité, la saison de conception, et le niveau socio-économique.
Après ajustements, et s'appuyant sur les estimations de polluants du modèle ASPEN pour 1999, l'étude montre une probabilité accrue de spina bifida chez les enfants dont la mère habitait dans les zones de recensement où les niveaux de benzène étaient les plus hauts (> 2,86-7,44 µg/m 3) en comparaison de ceux dont la mère vivait dans les zones où les niveaux de benzène étaient les plus bas (0,12-0,45 µg/m 3) ; l'odds ratio pour la comparaison était de 2,30 (IC à 95 % 1,22-4,33).
Des associations positives ont été mises en évidence aussi en comparant au groupe de plus faible exposition ceux d'expositions moyenne basse (> 0,45-0,98 µg/m 3; OR = 1,77 ; 1,04-3,00), moyenne (> 0,98-1,52 µg/m 3; OR = 1,90 ; 1,11-3,24) et moyenne haute (> 1,52-2,86 µg/m 3; OR = 1,40 ; 0,82-2,38).
En revanche, il n'a pas été mis en évidence d'association entre anencéphalie et niveaux d'exposition au benzène non plus qu'entre malformations congénitales du tube neural et expositions au toluène, à l'éthylbenzène et aux xylènes.
Cette étude, la première selon ses auteurs à avoir évalué la relation entre niveaux environnementaux de BTEX et malformations congénitales du tube neural, suggère une association entre exposition au benzène et spina bifida, dans la catégorie la plus fortement exposée mais aussi dans celles d'expositions plus faibles. Ces résultats appellent confirmation par des études complémentaires, fondées sur des données de surveillance des polluants de l'air et des biomarqueurs d'exposition et prenant en compte diverses autres données, dont le statut nutritionnel, les apports vitaminiques, en acide folique. Par ailleurs plutôt que de choisir l'adresse maternelle à l'accouchement, mieux vaudrait se référer à celle des premières semaines suivant la conception (qui peut être différente), période critique pour la survenue de malformations du tube neural.


Lupo PJ et coll. Maternal exposure to ambient levels of benzene and neural tube defects among offspring, Texas, 1999-2004. Environ Health Perspect, 2010, Publication avancée en ligne, 5 octobre 2010 (doi : 10.1289/ehp.1002212).