Des données rassurantes sur la testostérone des « garçons ICSI »

01/02/11
(JIM)
Dr Viola Polena

L'ICSI (Intra Cytoplasmic Sperm Injection) est une option de traitement efficace pour les couples qui doivent faire face à une infertilité masculine sévère. Cependant, l'existence de cas d'infertilité masculine familiale amène à poser la question de la « santé reproductive » des garçons issus d'ICSI, susceptibles d'hériter d'un fonctionnement testiculaire réduit. Certaines études ont démontré une incidence plus importante de malformations génitales chez les enfants issus d'ICSI et d'autres ont signalé des faibles taux de testostérone chez les enfants mâles issus d'ICSI à l'âge de 3 mois. Toutefois les connaissances actuelles restent limitées et jusqu'à ce jour aucune étude n'a analysé, au-delà de l'enfance, le fonctionnement des cellules de Leydig chez les garçons issus d'ICSI et dont le père présentait des problèmes sévères d'infertilité.
Cette étude prospective évalue le risque potentiel de dysfonctionnement gonadique des garçons de 14 ans issus d'ICSI et dont le père présentait des troubles importants de la fertilité, par la mesure de la testostérone salivaire. La testostérone salivaire reflète la fraction libre de la testostérone circulante et sa mesure peut être utilisée comme indice de la testostérone sérique, étant donné leur forte corrélation.
Une mesure des taux matinaux de testostérone salivaire a été effectuée chez 120 garçons qui ont eu 14 ans entre janvier 2008 et avril 2010, dont 58 issus d'ICSI et 62 issus d'une conception spontanée (CS). Les échantillons salivaires étaient collectés à la maison entre 6 et 10H du matin.
Les garçons issus d'ICSI étaient en moyenne de deux mois plus âgés que les garçons issus d'une CS (14,3±0,4 vs 14,1±0,1 ans ; p<0,001). Le poids moyen à la naissance, l'IMC actuelle et le stade de puberté étaient similaires entre les deux groupes (p=0,3 ; p=0,07 ; p=0,17 respectivement). Par contre, les garçons issus d'ICSI présentaient une taille significativement plus petite, par rapport aux garçons issus de CS (p=0,004). Deux garçons issus d'ICSI (3,4 %) avaient bénéficié d'une intervention chirurgicale pour des malformations génitales sévères. Aucun des adolescents issus d'ICSI et testés (n=54) ne présentait d'anomalie du caryotype.
Les taux de testostérone étaient comparables entre les deux groupes (groupe ICSI : 113±42 pg/ml vs groupe CS : 123±56 pg/ml). L'ajustement sur les autres facteurs tels que le poids à la naissance, l'IMC actuel, l'âge et le stade de puberté à l'examen physique, n'a pas modifié ces résultats. Dans le groupe ICSI, les taux de testostérone des garçons dont le père présentait une oligospermie sévère n'étaient pas différents de ceux des garçons appariés issus de CS.
En conclusion, les résultats de cette étude montrent que, à l'âge de 14 ans, les taux de testostérone salivaire sont comparables entre les garçons issus d'ICSI et les garçons issus de conceptions spontanées.
Sur la base de ces résultats préliminaires, on peut espérer que les garçons issus d'ICSI auront un fonctionnement testiculaire normal à l'âge adulte. Cependant, un suivi à l'âge adulte des garçons issus d'ICSI reste nécessaire pour confirmer un fonctionnement gonadique normal.



Belva F et coll. : Salivary testosterone concentrations in pubertal ICSI boys compared with spontaneously conceived boys. Hum Reprod., 2010 ; publication avancée en ligne le 7 décembre