09/02/11
(JIM)
Dr Jean-Noël Beuzen
Les traitements pharmacologiques et psychosociaux ont depuis longtemps fait la preuve de leur efficacité chez les enfants atteints d'un trouble de déficit d'attention avec hyperactivité (TDAH). Cependant, les effets secondaires des psychotropes prescrits et les difficultés à obtenir une implication réelle pour les thérapies psychosociales, ont conduit à explorer d'autres pistes. Les effets d'un régime restreint ont été étudiés à de nombreuses reprises chez ces patients, dans des groupes sélectionnés, mais jamais chez des patients « tout-venant ». Une étude a donc été conduite par Lidy Pelsser et ses collègues du centre TDAH d'Eindhoven (Pays-Bas) et publiée ce mois-ci dans le Lancet. Cette étude se base sur le principe que l'hypersensibilité de ces enfants, ou leur intolérance à certains aliments ou additifs alimentaires, constituerait pour eux un important et réel facteur de risque de survenue des troubles.
L'étude a été menée sur une cohorte de 100 enfants, âgés de 4 à 8 ans, présentant un diagnostic de TDAH. De manière randomisée et après une période d'observation de deux semaines, 50 d'entre eux ont été placés dans le groupe « contrôle » (alimentation saine) et cinquante dans le groupe « régime » (alimentation sélectivement restreinte, constituée de peu d'aliments allergéniques: riz, viande, légumes, poires, eau, mais complémentée en pommes de terre, fruits et blé), pendant une première période de 5 semaines. Les « répondeurs » du groupe « régime », c'est-à-dire les enfants dont le score à l'échelle de déficit d'attention (ADHD Rating Scale ou ARS) avait chuté d'au moins 40 %, ont été invités à participer à la deuxième phase de l'étude qui consistait à introduire dans leur régime successivement 3 aliments dits « IgG riches » ou « IgG pauvres » en fonction des taux d'IgG sériques spécifiques à ces aliments retrouvés dans les prélèvements sanguins initiaux. Les variations des scores à l'échelle ARS, ont été mesurées entre le début de l'étude et la fin de la première phase (évaluation en simple aveugle pour les médecins) puis à la fin de la seconde phase (évaluation en double aveugle pour les parents et médecins). Les taux d'IgG ont été également dosés lors des mêmes visites.
Parmi les 41 enfants placés dans le groupe « régime » et qui sont allés jusqu'à la fin de l'étude, 17 (41,5 %) n'avaient présenté aucun changement de leur comportement à la fin des 2 premières semaines d'observation. A la fin de la première phase de l'étude, les symptômes de déficit d'attention et les signes d'opposition et de provocation se sont améliorés de 60 % chez les enfants sous régime restrictif par rapport à une absence totale de changement chez les enfants « contrôles ». Ces « bons répondeurs » ont reçu ensuite, à l'intérieur de leur régime, d'abord trois aliments IgG riches puis trois aliments IgG pauvres (ou inversement), choisis parmi 270 aliments testés. Les symptômes de TDAH sont réapparus chez 19 des 30 enfants entrés dans cette deuxième phase de l'étude spis aliments IgG riches comme sous aliments IgG pauvres. Etrangement, les taux initiaux sanguins d'IgG n'ont été d'aucune utilité pour prédire l'effet délétère des aliments sur les troubles comportementaux des enfants.
Cette étude, bien conduite, malgré quelques biais méthodologiques mineurs, fournit plusieurs pistes intéressantes. Doser les IgG en routine chez ces enfants est inutile, car leur taux est non prédictif et d'aucune aide pour adapter le régime alimentaire. Plus d'un tiers des enfants (36 %) ne se sont pas améliorés, résultat combiné de non-adhérence et de non-réponse au régime. Deux-tiers des enfants (63 %) ont rechuté dès l'introduction d'aliments « suspects », sans que l'étude ait pu montrer lesquels des aliments étaient à l'origine de cette hypersensibilité. Ce point est évidemment important à creuser afin d'éviter aux familles d'imposer des contraintes alimentaires inutiles pour leurs enfants. En identifiant les répondeurs/ non-répondeurs à ces types de régimes, on pourrait mieux poser l'indication des traitements psychotropes, soit en première intention, soit, plus tard, après échec des régimes restrictifs. Cette étude confirme également le bien fondé des actions de certains groupes d'opinion, en lutte contre l'adjonction systématique d'additifs, de colorants, de modificateurs de goût et autres conservateurs dans les aliments, dont on sait maintenant qu'ils ont un rôle dans l'aggravation du déficit d'attention chez l'enfant.
Pessler LM et coll. : Effects of a restricted elimination diet on the behaviour of children with attention-deficit hyperactivity disorder (INCA study): a randomized controlled trial. Lancet 2011; 377: 494-503.
(JIM)
Dr Jean-Noël Beuzen
Les traitements pharmacologiques et psychosociaux ont depuis longtemps fait la preuve de leur efficacité chez les enfants atteints d'un trouble de déficit d'attention avec hyperactivité (TDAH). Cependant, les effets secondaires des psychotropes prescrits et les difficultés à obtenir une implication réelle pour les thérapies psychosociales, ont conduit à explorer d'autres pistes. Les effets d'un régime restreint ont été étudiés à de nombreuses reprises chez ces patients, dans des groupes sélectionnés, mais jamais chez des patients « tout-venant ». Une étude a donc été conduite par Lidy Pelsser et ses collègues du centre TDAH d'Eindhoven (Pays-Bas) et publiée ce mois-ci dans le Lancet. Cette étude se base sur le principe que l'hypersensibilité de ces enfants, ou leur intolérance à certains aliments ou additifs alimentaires, constituerait pour eux un important et réel facteur de risque de survenue des troubles.
L'étude a été menée sur une cohorte de 100 enfants, âgés de 4 à 8 ans, présentant un diagnostic de TDAH. De manière randomisée et après une période d'observation de deux semaines, 50 d'entre eux ont été placés dans le groupe « contrôle » (alimentation saine) et cinquante dans le groupe « régime » (alimentation sélectivement restreinte, constituée de peu d'aliments allergéniques: riz, viande, légumes, poires, eau, mais complémentée en pommes de terre, fruits et blé), pendant une première période de 5 semaines. Les « répondeurs » du groupe « régime », c'est-à-dire les enfants dont le score à l'échelle de déficit d'attention (ADHD Rating Scale ou ARS) avait chuté d'au moins 40 %, ont été invités à participer à la deuxième phase de l'étude qui consistait à introduire dans leur régime successivement 3 aliments dits « IgG riches » ou « IgG pauvres » en fonction des taux d'IgG sériques spécifiques à ces aliments retrouvés dans les prélèvements sanguins initiaux. Les variations des scores à l'échelle ARS, ont été mesurées entre le début de l'étude et la fin de la première phase (évaluation en simple aveugle pour les médecins) puis à la fin de la seconde phase (évaluation en double aveugle pour les parents et médecins). Les taux d'IgG ont été également dosés lors des mêmes visites.
Parmi les 41 enfants placés dans le groupe « régime » et qui sont allés jusqu'à la fin de l'étude, 17 (41,5 %) n'avaient présenté aucun changement de leur comportement à la fin des 2 premières semaines d'observation. A la fin de la première phase de l'étude, les symptômes de déficit d'attention et les signes d'opposition et de provocation se sont améliorés de 60 % chez les enfants sous régime restrictif par rapport à une absence totale de changement chez les enfants « contrôles ». Ces « bons répondeurs » ont reçu ensuite, à l'intérieur de leur régime, d'abord trois aliments IgG riches puis trois aliments IgG pauvres (ou inversement), choisis parmi 270 aliments testés. Les symptômes de TDAH sont réapparus chez 19 des 30 enfants entrés dans cette deuxième phase de l'étude spis aliments IgG riches comme sous aliments IgG pauvres. Etrangement, les taux initiaux sanguins d'IgG n'ont été d'aucune utilité pour prédire l'effet délétère des aliments sur les troubles comportementaux des enfants.
Cette étude, bien conduite, malgré quelques biais méthodologiques mineurs, fournit plusieurs pistes intéressantes. Doser les IgG en routine chez ces enfants est inutile, car leur taux est non prédictif et d'aucune aide pour adapter le régime alimentaire. Plus d'un tiers des enfants (36 %) ne se sont pas améliorés, résultat combiné de non-adhérence et de non-réponse au régime. Deux-tiers des enfants (63 %) ont rechuté dès l'introduction d'aliments « suspects », sans que l'étude ait pu montrer lesquels des aliments étaient à l'origine de cette hypersensibilité. Ce point est évidemment important à creuser afin d'éviter aux familles d'imposer des contraintes alimentaires inutiles pour leurs enfants. En identifiant les répondeurs/ non-répondeurs à ces types de régimes, on pourrait mieux poser l'indication des traitements psychotropes, soit en première intention, soit, plus tard, après échec des régimes restrictifs. Cette étude confirme également le bien fondé des actions de certains groupes d'opinion, en lutte contre l'adjonction systématique d'additifs, de colorants, de modificateurs de goût et autres conservateurs dans les aliments, dont on sait maintenant qu'ils ont un rôle dans l'aggravation du déficit d'attention chez l'enfant.
Pessler LM et coll. : Effects of a restricted elimination diet on the behaviour of children with attention-deficit hyperactivity disorder (INCA study): a randomized controlled trial. Lancet 2011; 377: 494-503.
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