Les lecteurs MP3 responsables de surdité dans les aigus chez l'adolescent ?

10/03/11
(JIM)
Dr Jean-Marc Retbi

Les déficits auditifs [DA] dans les aigus, gênant la conversation, deviennent plus fréquents dans certains groupes de jeunes. L'enquête menée par AL Berg et YC Serpanos a ciblé un groupe à risque identifié, les adolescentes issues de milieux défavorisés.
Durant la période 1985-2008, 8 710 jeunes filles de 12 à 20 ans (moyenne d'âge : 15,8 ans), ont bénéficié d'un dépistage auditif à l'occasion d'un court séjour dans le même foyer d'accueil. La plupart d'entre elles étaient d'origine hispanique ou afro-américaine. Le DA dans les aigus était défini par des seuils auditifs supérieurs à 15 décibels [dB] pour les fréquences de 3 000, 4 000 et/ou 6 000 Hertz.
Une jeune fille testée sur huit (1 071/ 8 710, soit 12,3 %) présentait un DA dans les aigus, ce qui est bien plus que chez les adolescents tout venant. Les DA affectaient généralement les trois fréquences (90 % des cas) et les deux oreilles (95 % des cas), et 35 % d'entre eux dépassaient les 25 dB. En 24 ans, la prévalence annuelle des DA a presque doublé, croissant de 10,1 % en 1985 à 19,2 % en 2008 (p <0,001). La dernière année, 61 % des DA dépassaient 25 dB.
Entre 2001 et 2008, période pour laquelle on dispose d'une anamnèse, une jeune fille testée sur dix (286/ 2 698, soit 10,6 %) signalait des acouphènes. En 8 ans, la prévalence annuelle des bourdonnements d'oreille a triplé, ce qui est dû à l'explosion de l'utilisation des lecteurs MP3 et autres iPods (18,3 % en 2001 ; 76,4 % en 2008). A l'exception d'une, toutes les jeunes filles souffrant d'acouphènes écoutaient régulièrement de la musique avec un baladeur numérique.
Il est tentant de rattacher les DA dans les aigus à la même cause de traumatisme sonore. A peu près 20 % des utilisatrices de baladeurs audio numériques se plaignaient d'acouphènes et la moitié d'entre elles (10 %) souffraient aussi d'un DA dans les aigus. Il existait une association significative entre d'une part les baladeurs audio numériques et d'autre part les acouphènes (p <0,0001) ou les DA dans les aigus (p <0,001). La durée d'écoute quotidienne (<3h ou >=3h) n'avait pas d'influence.
Toutefois, en l'absence de groupe contrôle, on ne peut pas exclure formellement d'autres causes de traumatisme sonore.
D'après les auteurs, l'intervalle de fréquence 3 000-6 000 Hz devrait être inclus dans le protocole de dépistage des troubles auditifs chez les grands enfants et les adolescents afin de déceler des DA dans les hautes fréquences. La réversibilité des surdités et des acouphènes rapportés à l'utilisation des baladeurs audio numériques est incertaine. Des stratégies de prévention devraient être mises au point et appliquées aux groupes de jeunes à risque.
Berg AL, Serpanos YC. High frequency hearing sensitivity in adolescents females of a lower socioeconomic status over a period of 24 years (1985-2008). J Adolesc Health 2011 ; 48 : 203-208

intéressant merci