LA MALADIE COELIAQUE
Catherine WANTY, Gastroentérologie Pédiatrique, UCL St LUc.
La maladie coeliaque est la seule maladie auto-immune pour laquelle l’élément
déclenchant est connu. Cette entéropathie se caractérise par une
hypersensibilité au gluten et survient chez des sujets génétiquement prédisposés
. La consommation de gluten entraîne chez ces patients la production
d’anticorps contre l’enzyme transglutaminase 2 (TG2) induisant une inflammation
intestinale chronique et une malabsorption.
Epidémiologie
De récentes études épidémiologiques (1) ont mis en évidence une incidence
accrue de la maladie coeliaque ces 20 dernières années, tout comme d’autres
maladies auto-immunitaires, tel le diabète de typeI.
Actuellement, on estime la prévalence de la maladie en Europe de 1/300 à
1/100. Elle varie d’un pays à l’autre et est ainsi plus importante en Italie et
dans les pays scandinaves.
Il n’y a pas d’explication claire à cette prévalence accrue constatée
actuellement . Des modifications du génome humain ne peuvent survenir si
rapidement .Des facteurs environnementaux sont donc certainement responsables,
sans qu’ils ne soient clairement identifiés. Certains incriminent des facteurs
sanitaires comme cette étude finlandaise récente qui relève une incidence
accrue de coeliaquie dans leurs contrées par rapport à une région russe voisine
moins favorisée et où l’hygiène est moins respectée (2). D’autres incriminent
l’intervention de facteurs alimentaires, comme les protéines contenues dans les
formules infantiles. En effet, une étude a identifié récemment chez des patients
coeliaques de moins de 2 ans une immunoréaction de type IgA pour la caséine
bovine plus faible que dans le groupe controle sain (3).
Pathogenèse
Qu’est-ce que le gluten?
Le gluten est une fraction des protéines contenues dans le blé ( wheat),
le seigle ( rye) et l’orge (barley). Il est constitué essentiellement de 2
protéines : la gliadine et la gluténine. Celles-ci, mélangées à de l’eau,
donnent à la farine sa structure élastique.
Une séquence spécifique de 33 acides aminés présente dans la gliadine a été
récemment identifiée comme la partie la plus immunogène. (4,5). Ce peptide
resistant à l’acidité gastrique et aux protéases du pancréas et des membranes de
la bordure en brosse peut traverser l’épithelium digestif pour provoquer une
réponse immunitaire dans la lamina propria avec activation de lymphocytes T et
production de cytokines .
L’atrophie villositaire et l’hyperplasie des cryptes est un trait
caractéristique de la maladie mais c’est surtout l’infiltration lymphocytaire
intraépithéliale qui joue le rôle clé dans la pathogénie . (4,5)
Les transglutaminases sont responsables de la déamination des peptides de
la gliadine et jouent un rôle clé dans la présentation de l’antigène ainsi que
de l’activation lymphocytaire qui en découle. On a démontré une surexpression
duodénale et une activité accrue des transglutaminases chez les patients
coeliaques. Les anticorps développés dans la maladie coeliaque ne bloquent donc
pas l’activité de la transglutaminase mais au contraire la stimule, ce qui sans
doute, augmente la perméabilité épithéliale et vasculaire (6). Plusieurs
mécanismes de transport transcellulaire et paracellulaire pouvant expliquer
cette perméabilité accrue ont été récemment identifiés. ( 7,
Il est établi que la majorité des patients coeliaques sont porteurs de
l’HLA DQ2 et dans une moindre proportion de l’HLA DQ8. Toutefois, d’autres
gènes, non liés à l’HLA ainsi que des facteurs environnementaux sont
certainement en cause également puisqu’on considère que 20 à 30 % de la
population générale est porteuse de l’antigène DQ2. Tout récemment, Romanos et
ses collaborateurs ont mis en évidence un groupe d’allèles non HLA à risque. (9)
Ainsi, les individus hétérozygotes pour le génotype HLADQ2 et porteurs de ce
groupe d’allèles non HLA ont le même risque de développer la maladie que les
individus HLADQ2 homozygotes.
En outre, une étude génétique étendue en 2008 a mis en évidence 7 régions
chromosomiques partagées à la fois par la maladie coeliaque et le diabète de
type I (10). Cette découverte conforte le lien épidémiologique évident entre
ces 2 maladies et le rôle étiologique du gluten dans l’étiopathogénie du diabète
de type I est ainsi soulevé.
Symptômes
La coeliaquie peut se manifester sous différentes formes:
La forme classique de la maladie débute entre 6 et 24 mois ,
après introduction du gluten dans l’alimentation. Typiquement, les jeunes
enfants présenteront une diarrhée chronique, une anorexie, un ballonement
abdominal , une stagnation pondérale ou une perte de poids. On retrouvera
souvent également une irritabilité .
C’est la forme la plus connue mais la maladie peut survenir à tout âge.
Dans la coeliaquie tardive, les symptômes digestifs sont
souvent plus frustres: diarrhée ou constipation, douleurs abdominales
chroniques, ballonnement abdominal, …
Certains patients n’ont pas de symptômes digestifs et développent une
coeliaquie atypique: dermatite herpétiforme, hypoplasie de
l’émail dentaire , ostéopénie- ostéoporose, petite taille, retard pubertaire,
carence martiale, perturbation des transaminases, arthrite, épilepsie avec
calcifications occipitales ( syndrome de Gobbi)
On parlera de coeliaquie silencieuse quand
la maladie est découverte fortuitement chez un patient asymptomatique et de
coeliaquie latente quand un patient est porteur de sérologies
positives mais chez qui l’histologie est normale.
Maladies associées
On retrouve une incidence accrue de maladie coeliaque dans d’autres
pathologies auto-imunes et certains syndromes. Chez ces patients, un screening
systématique, même en l’absence de symptômes, est recommandé. On préconise un
suivi des sérologies dès l’âge de 3 ans si le gluten est introduit dans
l’alimentation depuis plus d’un an.
Diabète type I (8%)
Thyroidite auto-immune
Syndrome de Down (5-12%)
Syndrome de Turner (4-8%)
Syndrome de Williams (8%)
Déficit en IgA (1,7-7,7%)
Famille 1er degré ( 10%)
Diagnostic
Les critères de diagnostic de la maladie coeliaque ont été revisités en 1990
(11).
Bien que les biopsies intestinales soient encore considérées à l’heure
actuelle nécessaires pour confirmer le diagnostic de maladie coeliaque, les
tests sérologiques sont classiquement pratiqués en première intention et
identifieront les individus chez qui la procédure est indiquée. (12)
Tests sérologiques
L’ interprétation des études analysant l’efficacité des différents tests
sérologiques est difficile. ( inhomogénicité des populations, évolution des
techniques dans le temps, définitions histologiques différentes,…). Il y a
également peu d’études chez l’enfant de moins de 5 ans.
Sensibilité Spécificité
IgG anti-
gliadine 52-100%
50%
IgA
anti-gliadine
52-100% 92-97%
IgA anti-endomysium 88-100%
91-100%
IgA anti- transglutaminase ( porc) 89-94%
74-98%
IgA anti-transglutaminase ( prot. hum. recom) 96-100% 84-100%
IgG anti- transglutaminase 84-97% 91-93%
(12)
Les IgG anti- gliadine sont peu spécifiques et peuvent être faussement
positives dans toutes sortes de circonstances ( gastro-entérite, gastrite,
maladie inflammatoire du tube digestif, allergie aux protéines du lait de
vache,…)
Les anticorps anti-endomysium sont mis en évidence par immunofluorescence.
Ils sont beaucoup plus spécifiques mais la technique est longue, coûteuse et
l’interprétation délicate et donc opérateur-dépendante. De plus, l’efficacité
est moindre chez les enfants de moins de 2 ans.
Depuis 1999, il est possible de doser les IgA anti transglutaminase par RIA.
La valeur prédictive positive pour identifier une maladie coeliaque
histologique est quasi comparable à celle des IgA anti-endomysium ( chez un
sujet symptomatique, elle approche de 100) . Effectué initialement avec des
protéines de porc, ce test est encore plus sensible et spécifique depuis
l’utilisation de protéines humaines recombinantes. Cette technique étant moins
coûteuse et plus facile est donc la SEULE qui est recommandée actuellement lors
du screening initial.
De plus, contrairement aux Ac anti-endomysium, des taux élevés
d’IgAtransglutaminase semblent être corrélés à la présence quasi certaine d’une
atrophie villositaire.
Attention, toutefois, certaines études ont décrit des résultats où les IgA
anti- transglutaminases étaient faussement négatives alors que les IgA
anti-endomysium étaient positives et inversément. (13)
Les patients atteints d’autres pathologies auto-immunitaires, de troubles
neurologiques ou de déficience cardiaque ou hépatique peuvent développer des
taux relativement peu élevés d’IgA anti- transglutaminase sans corrélation
avec l’apparition d’une maladie coeliaque. Ces IgA anti- transglutaminase sont
en fait non spécifiques et dirigés contre d’autres épitopes de l’enzyme qui
peut être libérée en grande quantité par certains tissus lésés. (14)Les
techniques futures devraient pouvoir faire la distinction entre ces différents
épitopes.
Certains groupes recommandent dès lors, en cas de positivité des IgA
anti-transglutaminase , de vérifier la sensibilité au gluten avec les méthodes
sérologiques traditionnelles.
Tout récemment, ont été mis au point de nouveaux tests sérologiques utilisant
le dosage d’anticorps dirigés contre les peptides de la gliadine déaminée mais
l’efficacité de ces tests n’est pas supérieure à celle des
anti-transglutaminase (15) .
Déficit en IgA
2% des patients coeliaques sont porteurs également d’un déficit en IgA et
leurs sérologies IgA transglutaminase et endomysium seront donc faussement
normales. Il est donc recommandé de doser le taux d’IgA totales chez les enfants
dont les symptômes sont suspects d’une maladie coeliaque. Par contre, chez les
patients asymptomatiques, le risque de cumuler à la fois un déficit en IgA et
une maladie coeliaque est estimé très faible. ( 1/8500)
En cas de déficit en IgA et de symptômes suggestifs d’une maladie coeliaque,
le dosage des IgG anti-transglutaminase ou des IgG anti peptides de la gliadine
déaminée est alors recommandé.(16)
Biopsies intestinales
Pour confirmer le diagnostic de coeliaquie, de multiples biopsies
intestinales doivent être prélevées dans le 2ème et 3ème duodénum puisque la
maladie peut se répartir inégalement dans la muqueuse. Des prélèvements au
niveau du bulbe duodénal sont également nécessaires, les lésions n’étant parfois
présentes qu’à cet endroit ( 2,4% des 665 enfants coeliaques d’une étude
multicentrique) (17) .
Les caractéristiques histologiques peuvent être classées en fonction de leur
sévérité. La classification de Marsh tient compte de l’infiltration
lymphocytaire intraépithéliale ( plus de 30 lymphocytes par 100 entérocytes), de
l’index mitotique des lymphocytes intaépithéliaux( sup à 0,2%) et des
modifications structurales ( élongation des cryptes, atrophie villostaires).(
18) La lymphocytose intraépithéliale semble être un marqueur plus sensible et
plus précoce de la maladie.
Marsh 1 : infiltration lymphocytaire intraépithéliale
Marsh2 : Marsh 1 +cryptes hyperplasiques
Marsh 3 : Marsh2 +degré variable d’atrophie villositiare
Marsh 4: atrophie villositaire totale et hypoplasie des cryptes.
L’image histologique n’est toutefois pas pathognomonique et le diagnostic
doit être corrélé à la clinique.
Dans les cas où le diagnostic est difficile ( sérologies positives et
histologie Marsch I, patient à risque avec sérologie positive et histologie
normale), d’autres stratégies peuvent être envisagées: détermination du groupe
HLA, nouveau contrôle des biopsies, essai d’un régime sans gluten , détection
immunohistochimique des IgA anti-transglutaminases tissulaire ( 19)….
Challenge test en cas de diagnostic posé avant 2 ans?
Les recommandations de 1990 conseillent toujours la réalisation d’un
challenge test ( reintroduction temporaire du gluten et réalisation de nouvelles
biopsies intestinales) chez les enfants chez qui le diagnostic a été posé avant
l’âge de 2 ans. La performance actuelle des test sérologiques remet en question
cette procédure invalidante. En effet, celle-ci ne semble plus avoir d’intérêt
si les biopsies et les sérologies initiales sont clairement pathologiques.
Traitement
Le seul traitement actuel des patients coeliaques, qu’ils soient
symptomatiques ou asymptomatiques, est un régime strict excluant le gluten. Ce
régime doit être suivi à vie afin d’éviter les complications à long-terme de la
maladie. ( mortalité multipliée par 4 si régime non suivi )(20) . Par ailleurs,
l’observance complète au régime est prouvé améliorer la densité osseuse chez
des enfants et adolescents à la fois diabétiques et coeliaques . (21)
Froment, seigle, orge, épeautre, kamut, durum, engrain, amidonnier sont
interdits.
Le maïs, le riz, le sarrazin, le millet, la farine de pomme de terre ne
contiennent pas de gluten et peuvent être consommés.
Des farines sans gluten ainsi que d’autres produits (pates, biscuits,
biscottes, … ) sont disponibles sur le marché et même à présent en grande
surface. Les dernières normes européennes fixent la quantité maximale de gluten
à 200ppm par 100 g de matière sèche pour les produits exempts de gluten. Ces
produits sont reconnaissables à leur logo représentant un épi de blé barré.
Depuis 2006 en Belgique, une intervention de 39 euros mensuel est octroyée
aux patients coeliaques présentant les critères sérologiques et histologiques
classiques.
Une étude récente montre une amélioration globale de leur santé sous régime
sans gluten chez 66% des enfants coeliaques suivis, sans qu’il y ait pour cela
altération de leur qualité de vie. (22)
Attention, en cas d’entrave au régime, certains patients ressentent à nouveau
rapidement des symptômes tandis que d’autres pas, ce qui n’aide pas à une
compliance absolue au régime.
L’adolescence est une période particulièrement délicate à ce niveau.
Ainsi, certaines études révèlent une non-compliance complète au régime chez
6 à 37% des jeunes dans cette tranche d’âge. (23)
Les associations de patients aide beaucoup à l’adhérence au régime et une
meilleure compréhension de la maladie . En Belgique, cette association est très
active.
Suivi
Il est recommandé de contrôler le taux d’IGA transglutaminase 6 mois après
l’induction du régime au gluten . La diminution du titre d’anticorps est un
marqueur indirect de la compliance au régime.
Quand introduire le gluten chez le nourrisson?
L’ESPGHAN recommande à présent d’introduire le gluten dans l’alimentation du
nourrisson entre 4 et 6 mois. Les quantités de gluten doivent être modérées et
progressives. (24) Des études récentes montrent un risque accru de développer
une maladie coeliaque si le gluten est introduit avant l’âge de 3mois (x 5) ou
après le 7ème mois (x7) chez des nourrissons prédisposés. (25)
L’allaitement maternel est hautement recommandé également chez les enfants
à risque d’intolérance car il semble avoir un rôle protecteur contre le
développement de la maladie. (26)
le lien:
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Catherine WANTY, Gastroentérologie Pédiatrique, UCL St LUc.
La maladie coeliaque est la seule maladie auto-immune pour laquelle l’élément
déclenchant est connu. Cette entéropathie se caractérise par une
hypersensibilité au gluten et survient chez des sujets génétiquement prédisposés
. La consommation de gluten entraîne chez ces patients la production
d’anticorps contre l’enzyme transglutaminase 2 (TG2) induisant une inflammation
intestinale chronique et une malabsorption.
Epidémiologie
De récentes études épidémiologiques (1) ont mis en évidence une incidence
accrue de la maladie coeliaque ces 20 dernières années, tout comme d’autres
maladies auto-immunitaires, tel le diabète de typeI.
Actuellement, on estime la prévalence de la maladie en Europe de 1/300 à
1/100. Elle varie d’un pays à l’autre et est ainsi plus importante en Italie et
dans les pays scandinaves.
Il n’y a pas d’explication claire à cette prévalence accrue constatée
actuellement . Des modifications du génome humain ne peuvent survenir si
rapidement .Des facteurs environnementaux sont donc certainement responsables,
sans qu’ils ne soient clairement identifiés. Certains incriminent des facteurs
sanitaires comme cette étude finlandaise récente qui relève une incidence
accrue de coeliaquie dans leurs contrées par rapport à une région russe voisine
moins favorisée et où l’hygiène est moins respectée (2). D’autres incriminent
l’intervention de facteurs alimentaires, comme les protéines contenues dans les
formules infantiles. En effet, une étude a identifié récemment chez des patients
coeliaques de moins de 2 ans une immunoréaction de type IgA pour la caséine
bovine plus faible que dans le groupe controle sain (3).
Pathogenèse
Qu’est-ce que le gluten?
Le gluten est une fraction des protéines contenues dans le blé ( wheat),
le seigle ( rye) et l’orge (barley). Il est constitué essentiellement de 2
protéines : la gliadine et la gluténine. Celles-ci, mélangées à de l’eau,
donnent à la farine sa structure élastique.
Une séquence spécifique de 33 acides aminés présente dans la gliadine a été
récemment identifiée comme la partie la plus immunogène. (4,5). Ce peptide
resistant à l’acidité gastrique et aux protéases du pancréas et des membranes de
la bordure en brosse peut traverser l’épithelium digestif pour provoquer une
réponse immunitaire dans la lamina propria avec activation de lymphocytes T et
production de cytokines .
L’atrophie villositaire et l’hyperplasie des cryptes est un trait
caractéristique de la maladie mais c’est surtout l’infiltration lymphocytaire
intraépithéliale qui joue le rôle clé dans la pathogénie . (4,5)
Les transglutaminases sont responsables de la déamination des peptides de
la gliadine et jouent un rôle clé dans la présentation de l’antigène ainsi que
de l’activation lymphocytaire qui en découle. On a démontré une surexpression
duodénale et une activité accrue des transglutaminases chez les patients
coeliaques. Les anticorps développés dans la maladie coeliaque ne bloquent donc
pas l’activité de la transglutaminase mais au contraire la stimule, ce qui sans
doute, augmente la perméabilité épithéliale et vasculaire (6). Plusieurs
mécanismes de transport transcellulaire et paracellulaire pouvant expliquer
cette perméabilité accrue ont été récemment identifiés. ( 7,
Il est établi que la majorité des patients coeliaques sont porteurs de
l’HLA DQ2 et dans une moindre proportion de l’HLA DQ8. Toutefois, d’autres
gènes, non liés à l’HLA ainsi que des facteurs environnementaux sont
certainement en cause également puisqu’on considère que 20 à 30 % de la
population générale est porteuse de l’antigène DQ2. Tout récemment, Romanos et
ses collaborateurs ont mis en évidence un groupe d’allèles non HLA à risque. (9)
Ainsi, les individus hétérozygotes pour le génotype HLADQ2 et porteurs de ce
groupe d’allèles non HLA ont le même risque de développer la maladie que les
individus HLADQ2 homozygotes.
En outre, une étude génétique étendue en 2008 a mis en évidence 7 régions
chromosomiques partagées à la fois par la maladie coeliaque et le diabète de
type I (10). Cette découverte conforte le lien épidémiologique évident entre
ces 2 maladies et le rôle étiologique du gluten dans l’étiopathogénie du diabète
de type I est ainsi soulevé.
Symptômes
La coeliaquie peut se manifester sous différentes formes:
La forme classique de la maladie débute entre 6 et 24 mois ,
après introduction du gluten dans l’alimentation. Typiquement, les jeunes
enfants présenteront une diarrhée chronique, une anorexie, un ballonement
abdominal , une stagnation pondérale ou une perte de poids. On retrouvera
souvent également une irritabilité .
C’est la forme la plus connue mais la maladie peut survenir à tout âge.
Dans la coeliaquie tardive, les symptômes digestifs sont
souvent plus frustres: diarrhée ou constipation, douleurs abdominales
chroniques, ballonnement abdominal, …
Certains patients n’ont pas de symptômes digestifs et développent une
coeliaquie atypique: dermatite herpétiforme, hypoplasie de
l’émail dentaire , ostéopénie- ostéoporose, petite taille, retard pubertaire,
carence martiale, perturbation des transaminases, arthrite, épilepsie avec
calcifications occipitales ( syndrome de Gobbi)
On parlera de coeliaquie silencieuse quand
la maladie est découverte fortuitement chez un patient asymptomatique et de
coeliaquie latente quand un patient est porteur de sérologies
positives mais chez qui l’histologie est normale.
Maladies associées
On retrouve une incidence accrue de maladie coeliaque dans d’autres
pathologies auto-imunes et certains syndromes. Chez ces patients, un screening
systématique, même en l’absence de symptômes, est recommandé. On préconise un
suivi des sérologies dès l’âge de 3 ans si le gluten est introduit dans
l’alimentation depuis plus d’un an.
Diabète type I (8%)
Thyroidite auto-immune
Syndrome de Down (5-12%)
Syndrome de Turner (4-8%)
Syndrome de Williams (8%)
Déficit en IgA (1,7-7,7%)
Famille 1er degré ( 10%)
Diagnostic
Les critères de diagnostic de la maladie coeliaque ont été revisités en 1990
(11).
Bien que les biopsies intestinales soient encore considérées à l’heure
actuelle nécessaires pour confirmer le diagnostic de maladie coeliaque, les
tests sérologiques sont classiquement pratiqués en première intention et
identifieront les individus chez qui la procédure est indiquée. (12)
Tests sérologiques
L’ interprétation des études analysant l’efficacité des différents tests
sérologiques est difficile. ( inhomogénicité des populations, évolution des
techniques dans le temps, définitions histologiques différentes,…). Il y a
également peu d’études chez l’enfant de moins de 5 ans.
Sensibilité Spécificité
IgG anti-
gliadine 52-100%
50%
IgA
anti-gliadine
52-100% 92-97%
IgA anti-endomysium 88-100%
91-100%
IgA anti- transglutaminase ( porc) 89-94%
74-98%
IgA anti-transglutaminase ( prot. hum. recom) 96-100% 84-100%
IgG anti- transglutaminase 84-97% 91-93%
(12)
Les IgG anti- gliadine sont peu spécifiques et peuvent être faussement
positives dans toutes sortes de circonstances ( gastro-entérite, gastrite,
maladie inflammatoire du tube digestif, allergie aux protéines du lait de
vache,…)
Les anticorps anti-endomysium sont mis en évidence par immunofluorescence.
Ils sont beaucoup plus spécifiques mais la technique est longue, coûteuse et
l’interprétation délicate et donc opérateur-dépendante. De plus, l’efficacité
est moindre chez les enfants de moins de 2 ans.
Depuis 1999, il est possible de doser les IgA anti transglutaminase par RIA.
La valeur prédictive positive pour identifier une maladie coeliaque
histologique est quasi comparable à celle des IgA anti-endomysium ( chez un
sujet symptomatique, elle approche de 100) . Effectué initialement avec des
protéines de porc, ce test est encore plus sensible et spécifique depuis
l’utilisation de protéines humaines recombinantes. Cette technique étant moins
coûteuse et plus facile est donc la SEULE qui est recommandée actuellement lors
du screening initial.
De plus, contrairement aux Ac anti-endomysium, des taux élevés
d’IgAtransglutaminase semblent être corrélés à la présence quasi certaine d’une
atrophie villositaire.
Attention, toutefois, certaines études ont décrit des résultats où les IgA
anti- transglutaminases étaient faussement négatives alors que les IgA
anti-endomysium étaient positives et inversément. (13)
Les patients atteints d’autres pathologies auto-immunitaires, de troubles
neurologiques ou de déficience cardiaque ou hépatique peuvent développer des
taux relativement peu élevés d’IgA anti- transglutaminase sans corrélation
avec l’apparition d’une maladie coeliaque. Ces IgA anti- transglutaminase sont
en fait non spécifiques et dirigés contre d’autres épitopes de l’enzyme qui
peut être libérée en grande quantité par certains tissus lésés. (14)Les
techniques futures devraient pouvoir faire la distinction entre ces différents
épitopes.
Certains groupes recommandent dès lors, en cas de positivité des IgA
anti-transglutaminase , de vérifier la sensibilité au gluten avec les méthodes
sérologiques traditionnelles.
Tout récemment, ont été mis au point de nouveaux tests sérologiques utilisant
le dosage d’anticorps dirigés contre les peptides de la gliadine déaminée mais
l’efficacité de ces tests n’est pas supérieure à celle des
anti-transglutaminase (15) .
Déficit en IgA
2% des patients coeliaques sont porteurs également d’un déficit en IgA et
leurs sérologies IgA transglutaminase et endomysium seront donc faussement
normales. Il est donc recommandé de doser le taux d’IgA totales chez les enfants
dont les symptômes sont suspects d’une maladie coeliaque. Par contre, chez les
patients asymptomatiques, le risque de cumuler à la fois un déficit en IgA et
une maladie coeliaque est estimé très faible. ( 1/8500)
En cas de déficit en IgA et de symptômes suggestifs d’une maladie coeliaque,
le dosage des IgG anti-transglutaminase ou des IgG anti peptides de la gliadine
déaminée est alors recommandé.(16)
Biopsies intestinales
Pour confirmer le diagnostic de coeliaquie, de multiples biopsies
intestinales doivent être prélevées dans le 2ème et 3ème duodénum puisque la
maladie peut se répartir inégalement dans la muqueuse. Des prélèvements au
niveau du bulbe duodénal sont également nécessaires, les lésions n’étant parfois
présentes qu’à cet endroit ( 2,4% des 665 enfants coeliaques d’une étude
multicentrique) (17) .
Les caractéristiques histologiques peuvent être classées en fonction de leur
sévérité. La classification de Marsh tient compte de l’infiltration
lymphocytaire intraépithéliale ( plus de 30 lymphocytes par 100 entérocytes), de
l’index mitotique des lymphocytes intaépithéliaux( sup à 0,2%) et des
modifications structurales ( élongation des cryptes, atrophie villostaires).(
18) La lymphocytose intraépithéliale semble être un marqueur plus sensible et
plus précoce de la maladie.
Marsh 1 : infiltration lymphocytaire intraépithéliale
Marsh2 : Marsh 1 +cryptes hyperplasiques
Marsh 3 : Marsh2 +degré variable d’atrophie villositiare
Marsh 4: atrophie villositaire totale et hypoplasie des cryptes.
L’image histologique n’est toutefois pas pathognomonique et le diagnostic
doit être corrélé à la clinique.
Dans les cas où le diagnostic est difficile ( sérologies positives et
histologie Marsch I, patient à risque avec sérologie positive et histologie
normale), d’autres stratégies peuvent être envisagées: détermination du groupe
HLA, nouveau contrôle des biopsies, essai d’un régime sans gluten , détection
immunohistochimique des IgA anti-transglutaminases tissulaire ( 19)….
Challenge test en cas de diagnostic posé avant 2 ans?
Les recommandations de 1990 conseillent toujours la réalisation d’un
challenge test ( reintroduction temporaire du gluten et réalisation de nouvelles
biopsies intestinales) chez les enfants chez qui le diagnostic a été posé avant
l’âge de 2 ans. La performance actuelle des test sérologiques remet en question
cette procédure invalidante. En effet, celle-ci ne semble plus avoir d’intérêt
si les biopsies et les sérologies initiales sont clairement pathologiques.
Traitement
Le seul traitement actuel des patients coeliaques, qu’ils soient
symptomatiques ou asymptomatiques, est un régime strict excluant le gluten. Ce
régime doit être suivi à vie afin d’éviter les complications à long-terme de la
maladie. ( mortalité multipliée par 4 si régime non suivi )(20) . Par ailleurs,
l’observance complète au régime est prouvé améliorer la densité osseuse chez
des enfants et adolescents à la fois diabétiques et coeliaques . (21)
Froment, seigle, orge, épeautre, kamut, durum, engrain, amidonnier sont
interdits.
Le maïs, le riz, le sarrazin, le millet, la farine de pomme de terre ne
contiennent pas de gluten et peuvent être consommés.
Des farines sans gluten ainsi que d’autres produits (pates, biscuits,
biscottes, … ) sont disponibles sur le marché et même à présent en grande
surface. Les dernières normes européennes fixent la quantité maximale de gluten
à 200ppm par 100 g de matière sèche pour les produits exempts de gluten. Ces
produits sont reconnaissables à leur logo représentant un épi de blé barré.
Depuis 2006 en Belgique, une intervention de 39 euros mensuel est octroyée
aux patients coeliaques présentant les critères sérologiques et histologiques
classiques.
Une étude récente montre une amélioration globale de leur santé sous régime
sans gluten chez 66% des enfants coeliaques suivis, sans qu’il y ait pour cela
altération de leur qualité de vie. (22)
Attention, en cas d’entrave au régime, certains patients ressentent à nouveau
rapidement des symptômes tandis que d’autres pas, ce qui n’aide pas à une
compliance absolue au régime.
L’adolescence est une période particulièrement délicate à ce niveau.
Ainsi, certaines études révèlent une non-compliance complète au régime chez
6 à 37% des jeunes dans cette tranche d’âge. (23)
Les associations de patients aide beaucoup à l’adhérence au régime et une
meilleure compréhension de la maladie . En Belgique, cette association est très
active.
Suivi
Il est recommandé de contrôler le taux d’IGA transglutaminase 6 mois après
l’induction du régime au gluten . La diminution du titre d’anticorps est un
marqueur indirect de la compliance au régime.
Quand introduire le gluten chez le nourrisson?
L’ESPGHAN recommande à présent d’introduire le gluten dans l’alimentation du
nourrisson entre 4 et 6 mois. Les quantités de gluten doivent être modérées et
progressives. (24) Des études récentes montrent un risque accru de développer
une maladie coeliaque si le gluten est introduit avant l’âge de 3mois (x 5) ou
après le 7ème mois (x7) chez des nourrissons prédisposés. (25)
L’allaitement maternel est hautement recommandé également chez les enfants
à risque d’intolérance car il semble avoir un rôle protecteur contre le
développement de la maladie. (26)
le lien:
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Aujourd'hui à 02:01 par Baaloudjo
» Collection complète DCEM en questions-réponses
Aujourd'hui à 01:57 par Baaloudjo
» Télécharger EMC de Pneumologie PDF
Aujourd'hui à 01:52 par Baaloudjo
» 22/03/2024 Guide d’Échographie Pratique en Anesthésie-Réanimation - GUEPAR (2e édition)
Aujourd'hui à 01:45 par Baaloudjo
» LE LIVRE NOIR DES ALLERGIES #Allergologie
Aujourd'hui à 01:44 par Baaloudjo
» Asthme Cas Cliniques #Allergologie
Aujourd'hui à 01:43 par Baaloudjo
» PHYSIOPATHOLOGIE DE L’ASTHME #Allergologie
Aujourd'hui à 01:42 par Baaloudjo
» Manuel D'échocardiographie Clinique pdf
Hier à 10:09 par kazran
» Livres Médicales - Cas Difficiles En Medecine Interne
Mar 19 Nov 2024, 22:15 par Sensé
» ATLAS d'Échographie
Mar 19 Nov 2024, 18:32 par carlosdoc
» POUR REVISER THERAPEUTIQUE CARDIO RESUMER en tableaux de la therapeutique cardio en 1 SEUL FICHIER !!
Mar 19 Nov 2024, 18:28 par carlosdoc
» POUR REVISER CARDIO HYPER QCM CARDIO CAS CLINIQUE !!
Mar 19 Nov 2024, 18:23 par carlosdoc
» PDF gratuit Pierre Kamina Anatomie clinique Tête cou dos Tome 2
Mar 19 Nov 2024, 11:42 par pingooz
» application Urgences 1 Clic full apk et complet
Mar 19 Nov 2024, 01:29 par dr.sami1978
» application Urgences 1 Clic full apk et complet #Application
Mar 19 Nov 2024, 01:18 par dr.sami1978